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Qu'est ce que la Géo-Anthropologie ? Qu'est-ce que l'anthropologie pluraliste ?


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Totalité, totalitarisme, totalisme :
Si l'on admet que la discussion sur le totalitarisme se limite à une période historique (le XXe siècle) et à deux ou trois formes de régimes autoritaires (fascisme, nazisme, soviétisme), il nous faut alors créer le néologisme de "totalisme" pour désigner ce qui se met en place pratiquement comme régime concernant toute l'humanité. Il faut peut-être alors échapper à la tentation de lui donner comme seul contenu le "libéralisme" comme vainqueur unique effectif des autoritarismes précédents, charismatiques ou non. En réalité, le régime en question, et en émergence, n'a pas, pour le moment, de nom, bien que son contenu puisse être associé fortement à la notion de "technobureaucratie universelle". Ce n'est certainement pas un cosmopolitisme (selon U. Beck), car le politique, qui est toujours pluralité, tend à y être absorbé dans la gestion des populations et de la planète.

L'individualisme, idéologie justifiant le fait de n'agir que selon ses intérêts propres, est, paradoxalement, le meilleur garant d'une absence totale de singularité, par adhésion enthousiaste aux idéaux "pour tous". Dès que l'un d'eux émerge et emporte l'adhésion majoritaire, il est en effet de l'intérêt de chacun de "s'adapter". Le pire conformisme est ainsi le résultat automatique de la considération de ses intérêts, du moins ceux en termes de gains ou de pertes. Car pour ce qui relève de ce qui ne se partage pas, -l'être- c'est le contraire : il est d'autant moins respecté en soi qu'on cherche à le subordonner à "l'avoir plus". Mais l'être ne relève pas de l'individualisme : il est plutôt dépendant de la singularité, laquelle ne se calcule pas et se tient plutôt dans la résistance à la masse, et dans la décision de son propre altruisme, pour autant que sortir de l'échange de paroles est impossible pour tout sujet humain.
Voir aussi : capitalisme (est-il mort ?)

théologie :
Le discours sur le divin ne peut pas être "scientifique" puisque le divin est soit une perception personnelle de la transcendance, soit une organisation collective de la métaphysique. Il peut exister néanmoins une science de la théologie. Ainsi, une théorie des théologies comme constituantes de champs culturels est-elle légitime. Une hypothèse peut y être proposée selon laquelle dans un champ culturel donné, de consistance suffisante, les théologies dialoguent entre elles pour former un dispositif logique, même si elles semblent se combattre farouchement. Ainsi, les région "occidentales" de l"hémisphère nord semblent depuis trois mille ans travaillées par une discussion entre "monothéismes", dans laquelle la question de l'arbitrage de justice est déplacée systématiquement entre l'arbitraire pur et la pure mécanique du "rapport". Il existe quatre possibilités logiques "pures" qui entrent ici dans un carré de Greimas : arbitraire pur, arbitraire discuté, arbitraire régulé, régulation pure. Le premier correspond à l'Islam reprenant la tradition "d'Abraham" (au nom lui-même constitué stratégiquement); le second à la religion judaïque (dans laquelle c'est dans la loi discutée et commentée que le divin transparaît); le troisième dans le christianisme, fondé sur le concept de partage (entre Dieu et Homme) et de rachat. Le quatrième est "l'athéisme" prévalant dans la gestion purement technique des rapports. En Orient, dont les champs culturels fonctionnent d'avantage à la cosmologie qu'au personnage divin, un autre carré logique apparaît, qui oppose plusieurs conceptions possibles de l'identité comme place (et non comme rapport). Il est aussi très plausible que la rencontre entre cosmologisme et "théisme" (incluant l'athéisme) forme à son tour un plus vaste champ culturel, même s'il tend à s'ignorer lui-même.


tétrapôle :
Le tétrapôle est une figure privilégiée en anthropologie. Loin d'être une obnubilation numérologique, l'intérêt pour le tétrapôle s'explique simplement par le fait que la culture humaine est très souvent un processus d'opposition entre deux termes, cette opposition se réalisant de façon progressive vers l'un ou vers l'autre des deux termes. Opposition et progressivité des médiations suffisent à déterminer un groupe à quatre pôles. L'une des plus grandes questions qui divise l'anthropologie... selon une opposition cruciale et ses médiations (car, après tout l'anthropologie n'est qu'un champ de culture humaine comme les autres) concerne le problème suivant : l'opposition "primordiale" qui relance constamment la pratique des oppositions est-elle d'abord purement intellectuelle, ou logique, ou bien trouve-t-elle dans la réalité une forme originelle dont elle découle ? Une deuxième grande question est celle-ci : les systèmes d'oppositions sont-ils en nombres indéfinis dans les diverses sociétés humaines, ou finissent-ils par se ranger dans une opposition globale dont-ils découlent ?
Le croisement entre ces deux questions (l'opposition est-elle logique ou substantielle ?/ l'opposition est-elle locale ou globale ?) place les chercheurs... dans quatre positionnements principaux :
Ceux qui pensent que l'opposition est logique et locale (dont le chef de file est Claude Lévi-Strauss)
Ceux qui pensent que l'opposition est logique et globale (dont un des tenants serait Philippe Descola)
Ceux qui pensent que l'opposition est substantielle et globale (Mary Douglas)
Ceux qui pensent que l'opposition est substantielle et locale (la tradition fonctionnaliste)

Lorsque j'analyse ces diverses positions en regard de ce qu'on peut appeler une culture mondiale, il semble que leur champ de conversation s'auto-détruit : en effet, dans une telle culture, il est évident en premier lieu que la tradition fonctionnaliste ne peut répondre de l'existence même d'un symbolisme global. Pourquoi ? Parce qu'un tel symbolisme ne peut que se confronter à des paradoxes insurmontables : exemple, le "global market" est à l'évidence impuissant à décrire sa propre tendance à l'autodestruction. Une théorie associant Etat mondial et Marché se heurte à la perspective d'un totalitarisme "absolu". Etc.
Mais les trois autres positions son aussi en difficulté : celle (douglasienne) qui admet la substance des oppositions doit rendre compte du fait que dans une société planétaire sans extériorité, il ne reste plus de justification externe de la souveraineté, et qu'en conséquence toute hiérarchisation ou structuration intérieure prend un caractère arbitraire d'oppression d'une de ses composantes.
La position lévi-straussienne rencontre aussi une aporie : comment s'assurer que dans une unique société-monde, les symbolismes variés ne sont pas appelés à se simplifier toujours davantage jusqu'à refléter cette unicité ?
La position "descolienne" élit -dans la diversité des positions possibles- un tétralogue universel qui subsume effectivement la diversité. Mais comment être sûr que cette pluralité logique même se maintienne dans l'unité et l'unicité ?
Nous proposons de résoudre ces difficultés et ces dilemmes en élaborant une notion plus "dialectique" de l'opposition. Il nous faut d'abord assumer qu'elle est à la fois toujours logique et toujours substantielle : en fait ce n'est pas seulement parce que la nature nous sert d'inspiration pour nos raisonnements que la logique se construit , mais aussi parce que dans la nature nous rencontrons toujours et partout la même tension entre le Sociétal et le Familier, qui reste la matrice de toutes les métaphores, d'autant plus que les médiations qui les joignent s'en inspirent encore.
Ensuite, si, à chaque échelle de formation des cultures, il y a bien tendance à former un système global clos (ce qui est affirmé par Lévi-Strauss comme ayant été très nettement vu par Auguste Comte à qui il en attribue la paternité), ce n'est pas, d'après moi, parce que la logique en elle-même tend à cette unification, mais pour deux raisons pratiques : l'une tient à la propension de notre espèce de primates à nous fasciner pour une Imago du collectif le plus vaste; l'autre tient à la réalité de la globalité "stratégique" pour des êtres parlants (les deux raisons ayant été probablement confondues dans un très lointain passé). La logique, en elle-même tend à la division et à la précision. Elle ouvre des mondes infinis de possibilités bien rangées. Au contraire, la métonymie, que Lévi-Strauss entrevoit comme destinée de la métaphore -à savoir le fait que l'englobement ou l'amalgame l'emportent finalement sur la comparaison ne tient pas seulement à l'outil que leur offre la commensurabilité. Il y faut une énergie supplémentaire, à la fois proprement psychique (l'imago) et situationnelle (l'inégalité ou la domination possibles). Notons aussi que le passage à la métonymie signe la destruction d'un système symbolique, son autolyse. Pour qu'un champ culturel puisse subsister, il faut qu'il restaure de la distance et donc de l'autonomie entre ses termes : la conversation est nécessaire, et avec elle la politique.
C'est la raison pour laquelle, dans notre optique, l'acte conversationnel lui-même, qui ne fait que déplier socialement la métaphore comme suite d'objections réciproques, comporte une forme symptômatique (où se déclare la pathologie de la difficulté à converser), une forme politique consciente (qui vise l'autonomie des participants et leur respect mutuel), mais aussi deux formes de dépassement (hors autodestruction par domination d'un pôle sur les trois autres) : l'une vers la singularité hors social, et l'autre vers le renouvellement du champ dans d'autres catégories, via des comportements collectifs "inclassables".
Précisons, pour être juste, que la différence entre "substantialistes" et "symbolistes" est beaucoup plus forte que celle entre "globalistes" et "localistes", car pour ceux qui considèrent le symbolisme dans son autonomie (le fonctionnement de l'esprit humain dirait Lévi-Strauss) il prend tantôt des aspects très particuliers, (liés à telle société originale ou particulière), tantôt des aspects plus universels. De même, l'empirisme considère l'intérêt immédiat, mais peut généraliser en retrouvant des situations globales qui forcent à des solutions également globales. L'opposition fondamentale concerne donc le choix entre le fonctionnement de l'esprit et la situation. La solution dialectique que nous proposons consiste à dire que si le fonctionnement de l'esprit comporte une autonomie très grande par rapports à telle ou telle situation, son mécanisme propre provient lui-même d'une situation princeps (résultant sans doute d'un très grand nombre de situations du même genre) qui a cristallisé sur le mode évolutionnaire la caractéristique humaine du privilège de l'opposition métaphorique. Or cette situation reste constamment présente, de sorte que se juxtaposent toujours le mécanisme qui recherche une opposition fondamentale permettant de "totaliser" et de "détotaliser", et la situation qui relance cette expérience. En somme, il peut sembler qu'une correspondance "magique" se manifeste entre "l'instinct" humain de penser logiquement et abstraitement, et la situation où les grandes oppositions concrètes (notamment entre Familier et Sociétal) paraissent appeler un tel traitement logique. Mais cette correspondance magique est une illusion : C'est parce que la situation concrète ressemble effectivement au schéma spontané de l'esprit que les deux semblent coïncider miraculeusement.
Voir aussi : culture, champ conversationnel, conversation historiale, métaphore, Douglas (Mary)

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